Après le passage du Typhon Sisang en 1987, qui a complètement détruit plus de 200.000 logements, le ministère des Affaires sociales et du Développement (DSWD) du gouvernement philippin a décidé de lancer un programme de logements résistants aux typhons pour les personnes qui vivent dans les régions les plus à risques. Plutôt que d’utiliser l’aide internationale pour fournir une nouvelle solution temporaire au problème, le gouvernement a décidé de concevoir des logements à bas coûts qui résistent aux typhons et qui peuvent être construits par les résidents en utilisant des matériaux locaux. C’était la seule solution pour briser ce cycle dévastateur, qui nuisait au développement de ces communautés. Le DSWD a invité le Professeur Satyendra P. Gupta du Centre asiatique de préparation aux catastrophes (ADPC) en vue de le conseiller dans cette démarche.

Les maisons construites sont simples, peu coûteuses et construites à partir de différents matériaux locaux. Les personnes en situation de pauvreté peuvent, avec des orientations techniques et l’aide d’amis ou de voisins, construire leurs propres logements. Les logements les plus récents ont utilisé des matériaux plus durables pour les toitures et les panneaux muraux. La résistance au vent des logements est le facteur le plus important de leur conception et cela leur permet de ne plus être détruits par les vents violents, alors qu’ils utilisent les mêmes matériaux que précédemment. Ils sont conçus pour résister à des vents de 180 km/h.

À ce jour, plus de 28.770 logements ont été construits, et aucun n’a été détruit lors des typhons qui ont suivi. Le programme se poursuit aux quatre coins des Philippines. La fourniture de logements n’est qu’un des aspects du projet. Ce projet a également permis d’améliorer la vie des familles concernées grâce aux programmes de développement communautaire et de génération de revenus. Les familles disposent de revenus plus élevés, sont en meilleure santé, sont mieux éduquées et prennent en charge leur vie au lieu de se baser uniquement sur l’aide du gouvernement.

Le principal aspect innovant de la conception est le renforcement de la structure pour lui permettre de résister aux typhons. Les logements englobent ainsi les éléments suivants qui permettent de résister aux typhons :

  • Un système d’ancrage reliant le toit au sol grâce à des fondations en ciment.
  • Un toit à quatre faces renforcé par des fermes de toit.
  • Utilisation de contreventement et d’ancrage supplémentaires sur les murs et les toits pour garantir la stabilité.

Les logements en soi sont assez petits, mesurant 3 m x 3,5 m. Il y a quatre poteaux en bois attachés à des socles en béton enfoncés dans la terre, et quatre poteaux latéraux, situés au milieu de chaque mur, également attachés à des socles en béton enfoncés partiellement dans la terre. Ces fondations solides, assorties à l’ancrage renforcé de la superstructure, permettent de garantir la résistance de ces logements aux typhons. Les coûts sont assez bas grâce à l’utilisation de matériaux locaux et peu coûteux pour la toiture, les murs et les sols de ces logements, dans la mesure où ces éléments ne sont pas essentiels pour garantir la résistance au vent des logements.

Des caractéristiques renforçant la résistance au vent sont inclues dans le logement pour améliorer la résistance au vent. Celles-ci incluent des contreventements sur les murs et le plafond, des tasseaux d’ancrage et des entretoises. Les poutres sont fixées aux fermes de toit et de l’acier renforcé est utilisé aux coins où les poutres joignent les poteaux des quatre coins.

Un aspect essentiel de la conception est sa facilité de compréhension et de construction. Il est ainsi possible de former les locaux sur les méthodes nécessaires, et la technologie peut être facilement transférée sans avoir besoin de formations longues et compliquées. Tous les aspects de la construction, à l’exception des aspects relatifs à la résistance au vent, peuvent être développés à la guise des bénéficiaires. Dès lors, chaque logement est assez différent, ce qui représente un certaine fierté pour les familles.

Dans la mesure du possible, les logements sont construits sur des parcelles de 80 , permettant l’utilisation du terrain autour du logement pour la culture de légumes ou d’autres activités génératrices de revenus.

Chaque logement nécessite un total de 47 jours-hommes pour sa construction, mais une petite équipe de personnes peut réaliser ce travail en dix jours. Souvent, la famille entière apporte son aide. Le revêtement de la toiture et des murs ne prend qu’un à deux jours, l’essentiel du travail étant la construction de la charpente.

En plus de la construction de logements basiques, le projet prévoit trois modules, ou options, pour améliorer ces logements. Cela permet à chaque famille de disposer d’un logement résistant aux typhons, et d’améliorer son logement par la suite en fonction de ses ressources et de ses besoins.

Le programme de développement communautaire mis en œuvre en parallèle du programme de logement est un aspect clé du projet dans la mesure où le projet vise non seulement à améliorer les conditions de logement des bénéficiaires mais également à améliorer d’autres aspects de leur vie quotidienne. Le projet englobe ainsi différents programmes de santé, d’éducation et de génération de revenus en plus de la construction des logements. La participation des bénéficiaires dans le programme est jugée essentielle et le DSWD passe beaucoup de temps à la préparation sociale d’un projet, bien avant le début des constructions, afin d’avoir une bonne structure communautaire.

L’implication des bénéficiaires dans le projet englobe plusieurs avantages. Premièrement, cela permet de s’assurer que le type de logement fourni correspond exactement aux attentes et besoins des bénéficiaires. Deuxièmement, cela garantit le renforcement des capacités humaines et permet d’éviter la création d’une dépendance. Troisièmement, elle génère un sentiment de fierté par rapport aux maisons, ce qui implique que les bénéficiaires les estimeront davantage et feront tout pour les garder. En outre, la fourniture de logements après l’arrivée d’une catastrophe naturelle permet de développer un esprit d’entraide et de coopération.

Une organisation communautaire viable est essentielle pour mobiliser les ressources, suivre la mise en œuvre du projet sur le terrain et gérer efficacement les ressources utilisées dans le cadre du projet. Des réunions sont organisées avec des représentants municipaux, des maires, des prêtres, des ONG et des représentants communautaires, et une assemblée communautaire se tient pour discuter du projet et expliquer les aspects pratiques de celui-ci. Les responsabilités des personnes impliquées sont expliquées.

Lorsque les bénéficiaires sont définis pour recevoir de l’aide dans le cadre du projet, ils sont organisés en groupes d’au moins dix familles. Des réunions régulières sont organisées tout au long du projet. Les bénéficiaires reçoivent des formations sur les méthodes de construction et peuvent ensuite construire un premier logement sous la férule d’un contremaître, et les autres logements du groupe sont ensuite construits avec une supervision limitée. En règle générale, un contremaître est responsable de la construction de 30 logements en collaboration avec les bénéficiaires et un travailleur social local. Ce système s’est avéré être très efficace et bénéfique. Il nécessite toutefois un engagement important en termes de personnel au début de chaque projet individuel, tant de l’équipe technique que des travailleurs sociaux.

Il existe un suivi continu du travail en cours en vue de s’assurer que les maisons sont correctement construites. Il est toujours tentant de faire des économies par ci par là, d’utiliser deux clous au lieu de trois, un peu moins de bois que prévu, mais le système mis en place permet de contrôler que les constructions répondent aux exigences. Un certificat d’achèvement des travaux est uniquement remis lorsque la maison est entièrement et correctement construite. Il n’existe pas de meilleure publicité pour le projet que le fait de voir que les maisons construites dans le cadre du projet sont les seules qui restent intactes après le passage d’un typhon dans la région. Il arrive souvent que les villageois qui n’ont pas participé au projet s’abritent chez des amis ou des proches dans les logements du projet pour être à l’abri en cas de typhon. La technologie est également transférée dans d’autres familles de la communauté qui ne sont pas bénéficiaires du projet, des familles qui peuvent se permettre de construire leurs propres maisons et qui intègrent les caractéristiques liées à la résistance au vent dans leurs constructions.

Les fonds du projet proviennent de quatre grandes sources : les bénéficiaires, le gouvernement local, le ministère des Affaires sociales et du Développement (DSWD – le gouvernement central) et les ONG. La contribution du DSWD se présente sous la forme d’une contribution complémentaire, finançant ce qui n’est pas financé par les autres sources et incluant le salaire du contremaître et l’achat des outils de menuiserie. La contribution des bénéficiaires est évaluée lors de l’évaluation des besoins au début du projet. Celle-ci inclut la fourniture des terrains, la main-d’œuvre des bénéficiaires et de leurs proches, les matériaux qu’ils peuvent obtenir, soit sauvés des maisons détruites, soit d’autres sources, et une contribution financière s’ils ont des économies. Le gouvernement local peut régler les problèmes liés aux terrains, en fournissant des zones de réinstallation pour les personnes qui ne possèdent pas de terrain et pour les communautés à hauts risques qui vivent sur la côte. Le DSWD fournit des matériaux et une aide technique pour la réalisation des fondations en béton et des fermes de toit en bois. Les revenus des bénéficiaires peuvent être affectés en raison du temps passé à la construction des logements, et les bénéficiaires bénéficient alors d’une allocation de travail. L’accent est placé sur l’apport des bénéficiaires, non seulement pour utiliser au mieux les fonds limités du DSWD, mais également pour renforcer l’engagement et l’implication des bénéficiaires.

La main-d’œuvre et les matériaux relatifs à la toiture et aux murs constituent la contribution attendue des bénéficiaires. Les coûts liés aux matériaux concernent principalement le bois pour la charpente (55 pour cent), les fondations (17 pour cent) et les matériaux relatifs à la toiture et aux murs (18 pour cent). Les zones de réinstallation ou les terrains individuels sont fournis par le gouvernement local ou pas des ONG.

L’importance de donner aux familles pauvres les moyens de générer des revenus est une partie essentielle du programme de développement communautaire intégré du DSWD qui est mis en œuvre parallèlement au programme d’hébergement. Il permet aux bénéficiaires du programme de logement de générer des revenus et permet d’améliorer les conditions de vie de la communauté.

Le terrain minimum de 80 m² demandé pour toutes les zones de réinstallation offre aux familles la possibilité de développer des petites entreprises de culture de légumes ou de cultiver des légumes pour leurs propres besoins. Les formations relatives aux méthodes de construction renforcent les capacités des bénéficiaires, qui peuvent utiliser ces nouvelles connaissances pour trouver du travail. De nombreuses petites entreprises, comme l’élevage de poissons, la culture d’ananas, la culture de champignons, la création de paniers et la production de matériaux de construction, sont dirigées par les femmes et les enfants de la famille afin de compléter la principale source de revenus de la famille.

Des formations sont fournies et des petits prêts sont accordés pour aider les familles à développer des activités génératrices de revenus et augmenter les revenus des ménages. Des étangs fournissent par exemple une source importante de protéines ainsi qu’une source de revenus. La culture d’ananas est une autre activité populaire. Les grands terrains permettent le développement de ces activités juste à côté de la maison, ce qui permet aux familles de les combiner avec leurs tâches quotidiennes.

Partenariat

Gouvernement national, universités/recherche