Ce projet de réhabilitation a été réalisé à Audi União, un des bidonvilles les plus grands et les plus pauvres de Curitiba au Brésil. Le projet protège les ménages vivant dans les zones à hauts risques sur les rives du fleuve Iguaçu, améliore les conditions de vie de ces ménages tout en leur permettant d’éviter les expulsions, et s’assure que les familles restent dans la même communauté. Il a développé une approche multidisciplinaire et participative intégrée qui implique des partenariats entre la communauté locale, les dirigeants locaux, des associations et des organismes publics au niveau local, régional et national.

Description du projet

Quels sont les objectifs du projet ?

L’objectif principal du projet est la protection des ménages vivant dans les zones à hauts risques sur les rives du fleuve Iguaçu dans le bidonville d’Audi União. Le projet inclut l’amélioration ou la fourniture de l’infrastructure urbaine (systèmes de drainage, sanitaires et mesures de contrôle des crues) ; le relogement dans la région des familles vivant dans les zones à hauts risques, incluant des logements d’une, deux ou trois chambres ; la réhabilitation des zones de protection environnementale ; la régularisation des régimes fonciers et des programmes sociaux contribuant à la sécurité, la mobilité urbaine, l’égalité des sexes et l’inclusion sociale. Des investissements ont également été réalisés au niveau de la construction et de l’amélioration de la santé publique, de l’éducation, de la culture, des sports et des loisirs.

Les résidents ont été impliqués tout au long du processus grâce à des partenariats développés entre les organismes publics et les associations locales de résidents. Le projet a permis d’améliorer des logements sans passer par la réinstallation et n’a réinstallé que les personnes qui étaient menacées d’inondations ou de glissements de terrain.

Dans quel contexte opère-t-il ?

Curitiba est une des villes dont la croissance est la plus rapide au Brésil, avec une population municipale d’1,8 million de personnes. La ville est connue pour différentes initiatives innovantes visant à améliorer l’environnement local. Audi União compte 3 144 familles à bas revenus, dont un grand nombre vivait auparavant dans des conditions précaires dans les zones de protection environnementale sur les rives du fleuve Iguaçu, un quartier fréquemment touché par des inondations dévastatrices. Il s’agit de la zone d’habitation informelle la plus grande et la plus pauvre de la ville de Curitiba, avec 70 pour cent de ménages gagnant moins que le salaire minimum et 86,5 pour cent des ménages vivant sans systèmes adéquats d’approvisionnement d’eau, d’électricité, de collecte des déchets et de drainage. Avec le taux d’homicide le plus élevé de la ville, les résidents d’Audi União sont confrontés à des conditions d’insécurité et de vulnérabilité. De nombreuses maisons sont construites sur des pilotis en utilisant des matériaux de construction de mauvaise qualité. Le projet a été mis en œuvre par la Société de logement social de Curitiba (COHAB/CT), un organisme de logement social créé en 1965 pour fournir des logements aux ménages à bas revenus dans la ville de Curitiba. Ses activités sont financées par des financements du gouvernement national et local et par des partenariats entre les secteurs public et privé. COHAB/CT met en œuvre les programmes de logement du gouvernement fédéral ainsi que les programmes de réhabilitation des bidonvilles.

Quelles sont les principales caractéristiques du projet ?

Ce projet de réhabilitation de bidonville a été réalisé à Audi União via une approche intégrée, multidisciplinaire et participative impliquant des partenariats entre la communauté locale, les dirigeants locaux, des associations et des organismes publics au niveau local, régional et national. Les résidents ont été impliqués tout au long du processus par le biais de partenariats établis entre les organismes publics et les associations locales de résidents. Le projet inclut l’amélioration et/ou la fourniture d’une infrastructure urbaine et de services. Des investissements ont également été réalisés dans la construction et l’amélioration de la santé publique, de l’éducation, de la culture, des sports et des loisirs. Des nouveaux logements sont fournis aux familles vivant dans les zones à hauts risques, et les régimes fonciers ont été régularisés. Des programmes sociaux contribuant à la sécurité, la mobilité urbaine, l’égalité des sexes et l’inclusion sociale ont également été développés. Des mesures de contrôle des crues ont permis de réduire de façon significative les inondations dans la région.

Comment est-il financé ?

Un financement total de 19,5 millions de dollars a été fourni par la CAIXA, Caisse d’épargne fédérale (67,2 pour cent) et par la Municipalité de Curitiba (32,8 pour cent), couvrant les domaines suivants : a) contrôle des crues ; b) réhabilitation des zones de protection environnementale ; c) construction et rénovation de logements ; d) régularisation des régimes fonciers ; e) rénovation urbaine ; f) inclusion sociale. En outre, la Municipalité a investi dans le développement et l’amélioration de services publics liés à la santé, l’éducation, la culture et les sports, et collabore avec le gouvernement de Paraná pour renforcer la sécurité publique.

Quel est son impact ?

Le projet a permis de réaliser des améliorations importantes au niveau des conditions de vie des résidents, incluant la réduction du risque d’inondation, l’amélioration de la sécurité, et l’amélioration des sanitaires et des conditions environnementales dans la communauté et ses alentours. À la suite de la mise en œuvre du système de prévention des inondations, il n’y a plus eu d’inondation importante dans la région, malgré les fortes pluies et les inondations dans les régions environnantes qui ne sont pas couvertes par le projet. Les niveaux de revenus ont augmenté, avec une hausse de 206 pour cent du nombre de familles gagnant au moins le salaire minimum. On a également constaté une réduction de 33 pour cent du nombre de morts violentes et de 26 pour cent du nombre de vols à main armée. La mobilité urbaine a été améliorée grâce à différentes actions dont le pavage et l’élargissement des rues, l’amélioration de l’éclairage public et des transports publics (avec 20 lignes de bus supplémentaires), le tri des déchets et l’enregistrement du domicile officiel. Les résidents ont été depuis impliqués dans la rénovation de leurs logements et on a constaté un changement progressif des habitudes et de la relation des résidents avec les lieux publics/communs.

 

Aspects innovants

  • Il s’agit d’une approche intégrée et pluridisciplinaire, incluant trois niveaux de gouvernement, qui a été mise en œuvre grâce à des partenariats entre différents acteurs et niveaux de gouvernement. La complexité des problèmes à aborder a nécessité des objectifs communs, une planification participative et des actions intégrées responsables sur le plan environnemental et justes sur le plan social, en impliquant les membres de la communauté tout au long du processus.
  • Garantir que les familles étaient délogées uniquement lorsque cela s’avérait nécessaire et pas à plus de 500 mètres de leur logement original, en respectant les liens entre les membres de la communauté. La solution de facilité aurait été de prôner une relocalisation partielle ou totale du quartier étant donné qu’il s’agissait d’une zone protégée sujette à des inondations. Cette solution a permis d’aborder les problèmes environnementaux tout en permettant aux résidents de rester dans leur communauté, évitant ainsi la démolition de milliers de logements construits grâce aux efforts et aux ressources financières de la communauté.
  • Ne pas se limiter aux améliorations physiques, en établissant des canaux de communication efficaces entre les résidents de la communauté et le gouvernement, en luttant contre des problèmes liés à l’égalité entre les sexes (notamment au niveau des titres de propriété) et en travaillant pour garantir le droit à un logement adéquat.

 

Quel est l’impact sur l’environnement ?

Le projet a utilisé des matériaux de construction traditionnels, dont nombre étaient disponibles sur place, pour la construction de nouveaux logements. Il a conservé les logements existants et les bâtiments collectifs, excepté dans les zones à hauts risques, en utilisant les ressources existantes. Le projet implique un système adéquat d’approvisionnement d’eau, des sanitaires, et un système de collecte des déchets, qui n’existaient pas auparavant dans le bidonville d’Audi União. Un système de drainage a également été développé pour combattre les nombreuses inondations dans la région. Aucune grande inondation n’a été constatée dans la région après la mise en place de ce système, malgré les fortes pluies.

 

Le projet est-il viable sur le plan financier ?

Le projet a été financé d’un côté par les gouvernements fédéral et municipal, et d’un autre côté en partenariat avec d’autres organisations et prestataires de services publics. Pour d’autres projets, pour lesquels des niveaux similaires de subventions publiques n’étaient pas disponibles, COHAB/CT a obtenu des subventions pour son travail via des partenariats entre les secteurs public et privé. Le projet a également placé l’accent sur le renforcement des compétences afin d’augmenter les revenus des familles. Différentes formations et activités axées sur la génération de revenus et sur l’emploi ont été réalisées dans la communauté ; dès lors, en 2010, le nombre de familles touchant au moins le salaire minimum avait augmenté de 206 pour cent. En outre, le fait que les résidents aient pu rester dans leur communauté sans devoir être réinstallés dans des régions lointaines a permis de maintenir les emplois existants et l’accès aux lieux de travail.

Quel est son impact social ?

L’approche du projet a démontré l’engagement de tous les acteurs impliqués et facilité la collaboration au sein de la communauté et parmi différents organismes publics et partenaires institutionnels. Des ONG locales ont joué un rôle majeur dans la facilitation de la collaboration, et le projet a placé l’accent sur le sentiment d’appartenance, la confiance, la permanence et la continuité au sein de la communauté, ce qui a permis de renforcer les liens sociaux et de maintenir les relations et réseaux existants.

Le projet travaille avec des familles très vulnérables et cherche à mettre en œuvre des stratégies qui luttent contre l’exclusion sociale et permettent de réduire les inégalités sociales. Les femmes ont particulièrement bénéficié de ce projet, notamment en matière de régularisation des régimes fonciers où la priorité est accordée aux femmes chefs de ménage.

Le projet a placé l’accent sur l’amélioration de l’accès aux droits et à l’information, la promotion de la citoyenneté et l’autonomisation des communautés. Les résidents paient à présent des factures de services subventionnés par l’État, et l’officialisation de l’accès à la propriété, l’amélioration de la mobilité urbaine et l’amélioration de l’accès à l’infrastructure et aux services publics ont permis aux résidents de jouer un rôle plus actif dans la société.

Obstacles

  • Dès le départ, les problèmes rencontrés étaient complexes et nécessitaient des solutions intégrées et pluridisciplinaires. COHAB/CT a travaillé en partenariat avec la communauté et différentes organisations locales pour lutter contre ces problèmes de façon intégrée.
  • À cause de contraintes financières, le projet original n’incluait pas la construction de services publics et d’établissements scolaires, alors qu’il existait une demande pour des écoles et des établissements hospitaliers et des installations sportives dans la région. Cela a surtout affecté les enfants et les jeunes, et ce problème a été en partie réglé en affectant des ressources municipales à la construction d’une crèche municipale, d’un centre pour les jeunes, de centres de santé et d’un centre d’aide sociale.
  • Bien que l’on ait constaté une amélioration notable des conditions de vie et de la qualité de vie pour les résidents, quelques problèmes sont toujours présents, notamment au niveau de l’accès au transport ferroviaire et des connexions au système des égouts, ce qui devrait être réglé grâce à un autre projet.

 

Leçons retenues

  • Durant la mise en œuvre du projet, on a constaté que les problèmes qui se présentaient dans les bidonvilles situés dans des zones de préservation de l’environnement affectaient l’ensemble de la ville, provoquant des dégâts sociaux, économiques, physiques et environnementaux.
  • Les partenariats étaient essentiels car les problèmes complexes rencontrés ne pouvaient être résolus par un seul organisme ou un seul groupe de personnes. L’établissement de partenariats a permis d’avoir des discussions basées sur les conditions spécifiques de la région, permettant également au gouvernement de ne pas se limiter à des interventions purement physiques.
  • Pour développer ces partenariats, il importe de reconnaître l’importance de l’implication des trois niveaux de gouvernement (fédéral, régional et local), de plusieurs secteurs du gouvernement municipal et de différentes organisations, différents groupes locaux et de professionnels impliqués dans l’accès aux droits sociaux et dans les services publics.
  • Afin de garantir des résultats positifs, il est important d’établir des liens directs entre les communautés et le gouvernement via une approche participative, un meilleur accès aux informations et une amélioration des canaux de communication. Il est reconnu qu’un partenariat solide entre la communauté et le gouvernement est essentiel pour garantir les droits des citoyens et le développement d’un sentiment d’appartenance parmi les résidents.
  • Des actions intégrées au niveau de la rénovation urbaine et de la fourniture d’infrastructures devraient être mises en œuvre conformément aux politiques publiques liées au logement, à l’aide sociale, à la santé, à l’éducation et à l’environnement.

 

Évaluation

Des rapports mensuels sont rédigés sur les activités réalisées par l’équipe d’aide sociale, et des données sont collectées sur les logements et d’autres interventions urbaines et physiques. L’équipe pluridisciplinaire qui met en œuvre le projet se réunit chaque mois afin de renforcer les communications et suivre le travail réalisé.

Différents indicateurs ont été développés pour le suivi et l’évaluation grâce à des fonds fournis par le Ministère brésilien des Villes afin de donner une visibilité aux résultats, à l’impact et au niveau de satisfaction de la communauté locale, et permettant d’analyser le processus de mise en œuvre ainsi que l’ efficacité des travaux réalisés. Une étude finale sera réalisée, et celle-ci devrait se pencher sur trois domaines clés :

  • Le logement et l’environnement urbain : incluant l’infrastructure basique, la mobilité urbaine, la qualité de l’environnement et le logement.
  • L’inclusion sociale: se concentrant sur l’accès aux services publics (éducation, santé, sport, loisirs, culture, aide sociale et sécurité publique), la citoyenneté, la participation et l’insertion dans le marché du travail.
  • La satisfaction des ménages: analysant l’évaluation des résidents locaux concernant leurs conditions de logement, l’infrastructure urbaine et les services, et étudiant l’impact du projet sur la vie sociale et communautaire.

 

Transfert

L’approche est actuellement transposée à plus grande échelle par COHAB/CT et est actuellement appliquée dans 64 projets actifs dans la ville de Curitiba dans des quartiers qui, à l’instar d’Audi União, nécessitent des actions intégrées. Dans chaque cas, l’approche est adaptée aux spécificités et complexités locales.

Bien que l’approche n’ait pas encore été transférée au niveau national ou international, le projet a attiré beaucoup d’intérêt et le quartier d’Audi União a accueilli de nombreux visiteurs nationaux et internationaux, dont le Secrétaire au Logement et au Développement urbain des États-Unis, Shaun Donovan.