Description du projet

En 2013, le Typhon Haiyan a détruit des régions entières des Philippines, causant de nombreuses pertes humaines et la destruction d’environ un million d’habitations. Dans le cadre du programme de reconstruction des habitations après le passage du Typhon Haiyan (2013-2016), CARE Philippines a aidé plus de 15.500 familles devenues sans domicile à cause de cette catastrophe à reconstruire leurs logements.

CARE Philippines est une des succursales nationales de CARE International. Il existe plus de 70 succursales de ce type aux quatre coins du monde.

CARE International est une organisation non-gouvernementale qui travaille pour lutter contre la pauvreté et promouvoir la justice sociale via des projets qui luttent contre différentes problématiques sociales telles que les réponses d’urgence après des catastrophes naturelles, l’éducation, la sécurité alimentaire, le VIH/SIDA, le réchauffement climatique, la santé maternelle et l’autonomisation des femmes et des filles. Chaque membre national du réseau travaille de façon indépendante pour gérer des programmes, lever des fonds, faire du lobbying sur certaines thématiques et sensibiliser le public dans le pays en question.

CARE Philippines est opérationnel depuis 1949 dans des régions qui sont souvent touchées par des catastrophes naturelles. L’organisation développe des projets qui répondent aux besoins des publics les plus vulnérables. Ce projet a été mis en œuvre en partenariat avec Accord (Assistance et coopération pour la résistance communautaire et le développement) et d’autres acteurs locaux.

Toutes les phases du travail de reconstruction ont été mises en œuvre en respectant les desiderata des familles et sont restées accessibles financièrement pour les familles concernées. Les familles ont reçu de l’aide pour pouvoir reconstruire elles-mêmes leurs logements. Le travail avec les familles pour les aider à reconstruire leurs propres logements est différent de la majorité des réponses aux catastrophes naturelles qui tendent à se concentrer sur des solutions temporaires prises en charge par des entrepreneurs externes. Cette approche d’autoconstruction aide également les familles à se sentir davantage responsables de leurs logements et d’acquérir le sentiment de pouvoir prendre leurs propres décisions par rapport à leurs logements et à leur vie en général.

Ce programme a placé l’accent sur l’accompagnement des familles les plus sévèrement touchées et les plus vulnérables à la suite de cette catastrophe. Ceci s’explique non seulement par le fait que ces personnes étaient les moins à même de pouvoir résoudre leurs problèmes de logement sans aide, mais également par le fait qu’il était très important de permettre aux personnes très vulnérables de jouer un rôle actif dans le développement de leurs propres solutions de logement.

Avec l’aide du programme, des groupes d’une dizaine de familles ont travaillé ensemble en tant que communautés pour mener à bien les constructions. Chaque logement reconstruit est unique, adapté aux besoins et aux moyens des familles qui le construisent. Certaines familles ont également bénéficié de subventions pour les aider à développer des petites entreprises après la perte de leurs emplois dans de nombreux secteurs (comme l’agriculture) après le passage du typhon.

Le projet a fourni une aide technique, des matériaux et des subventions pour aider certaines des familles les plus vulnérables du pays à construire de nouvelles habitations. Ces personnes ont bénéficié de formations en construction et de l’expertise de menuisiers qui ont voyagé dans différentes régions du pays pour aider les familles à construire leurs logements. Les matériaux initiaux pour les réparations (comme les toitures, les courroies de protection, les outils et les clous) ont été fournis par CARE. Les familles ont ensuite acheté d’autres matériaux grâce à leurs subventions. Les familles sont propriétaires des logements qui ont été construits, et l’accessibilité financière n’est dès lors plus un problème.

Le programme de reconstruction des habitations après le passage du typhon Haiyan a élaboré des directives en matière de construction sûre en vue de s’assurer que les familles construisent des habitations qui sont plus résistantes aux catastrophes naturelles. Les résidents ont été formés sur l’utilisation de ces directives lors de séminaires communautaires et de réunions individuelles. Même si les directives provenaient de CARE, les décisions relatives aux reconstructions revenaient sans conteste aux familles.

Au niveau national, le ministère de l’Aide sociale et du Développement du gouvernement des Philippines considère à présent que ces directives en matière de construction sûre élaborées dans le cadre du programme devraient être adoptées pour toutes les constructions de logements dans les zones sujettes aux catastrophes naturelles.

Objectifs

L’objectif du programme était d’aider les familles vulnérables à reconstruire leurs habitations après le passage du Typhon Haiyan. Il a également permis à ces familles de retrouver du travail à la suite de la perte de leur travail précédent à cause du typhon.

Les objectifs du programme étaient de :

  • Cibler les personnes les plus vulnérables dans des communautés rurales, qui sont souvent oubliées par les projets traditionnels de reconstruction après des catastrophes naturelles. Cela incluait les personnes âgées, les veufs et les veuves, les personnes handicapées, les femmes célibataires, les ménages dirigés par des femmes, les femmes enceintes, les femmes avec jeunes bébés et les familles nombreuses.
  • Fournir des formations aux familles pour leur permettre de construire leurs propres logements en renforçant leur résistance aux catastrophes naturelles. Ces formations ont également fourni de nouvelles compétences pouvant être utilisées plus tard.
  • Fournir des matériaux aux familles pour leur permettre de réaliser les premiers travaux.
  • Octroyer des subventions aux familles pour leur permettre d’acheter davantage de matériaux ou de payer d’autres travailleurs si elles ne peuvent réaliser elles-mêmes les travaux.
  • Élaborer des directives en matière de construction sûre en vue de construire des logements plus résistants dans le cadre de ce projet et dans le futur.
  • Encourager le développement de nouvelles opportunités d’emploi et de génération de revenus pour remplacer les emplois perdus à cause du typhon.

Un objectif à plus long terme du projet était de :

  • Offrir une alternative aux logements construits traditionnellement après les catastrophes, en démontrant que le travail avec les personnes activement impliquées dans la reconstruction de leurs propres logements peut être efficace.

Contexte

Pas moins de 4,1 millions de personnes sont devenues sans domicile et plus de 10.000 personnes auraient péri dans les régions affectées à la suite du passage du Typhon Haiyan en 2013. Il s’agissait du cyclone tropical le plus dévastateur jamais enregistré. De nombreuses habitations aux Philippines sont construites avec du bois et du bambou et n’ont dès lors pu supporter la force du typhon. Plus d’un million d’habitations ont été endommagées, dont la moitié de ces habitations ont été totalement détruites, laissant la place à des régions dévastées nécessitant la reconstruction des logements.

Outre les typhons, les Philippines sont sujettes à d’autres catastrophes comme des séismes et des éruptions volcaniques. Quatre-vingt-un pour cent de la population philippine est vulnérable aux typhons et le pays est le troisième pays du monde après le Vanuatu et le Tonga à être le plus sujet à des catastrophes naturelles. Depuis Haiyan, trois autres typhons particulièrement puissants (Hagupit, Haima and Nok-Te) ont frappé les Philippines. En février 2017, un séisme d’une magnitude de 6,7 a également touché le pays.

Le programme de CARE Philippines a travaillé dans les régions géographiquement isolées et défavorisées qui ont été le plus touchées par le typhon. Ces régions incluent les barangays sur les îles de Leyte, Samar et Panay. Ces barangays sont des petites communautés rurales qui reposent sur l’agriculture comme leur principale source de revenus. Ce travail est souvent complété par la gestion de petits commerces, mais il existe peu d’opportunités pour générer des revenus. Les revenus moyens dans ces régions sont très bas (40 à 80 dollars par mois) et il aurait dès lors été très difficile de reconstruire des logements sans l’aide de CARE Philippines.

Le principe même du programme implique que les villageois pouvaient contrôler la reconstruction de leurs habitations et que les travaux de construction qu’ils réalisaient étaient organisés autour de leur quotidien. Dès lors, s’ils souhaitaient passer une journée à travailler plutôt qu’à reconstruire leurs logements, c’était leur choix personnel. Cette liberté et cette flexibilité ont permis aux locaux de continuer à gagner de l’argent tout en réalisant les travaux de reconstruction de leurs habitations.

Principales caractéristiques

Ce programme s’est assuré de sélectionner les personnes les plus vulnérables des communautés locales car celles-ci étaient les moins en mesure de réaliser les travaux de reconstruction sans bénéficier d’aide. Grâce à ce programme, plus de 15.000 personnes qui étaient devenues sans domicile à cause du typhon vivent maintenant dans des habitations stables qu’elles ont elles-mêmes construites.

Le programme était communautaire, plaçant l’accent sur les choix des résidents et sur l’implication de la communauté dans la conception des logements. À la suite de formations, les familles ont effectué elles-mêmes les travaux de reconstruction mais pouvaient demander l’aide de menuisiers payés par le programme.

Des subventions ont également été octroyées, ce qui implique que les personnes qui n’étaient pas en mesure d’effectuer elles-mêmes les travaux pouvaient payer d’autres professionnels pour le faire. Des communautés se sont également rassemblées pour partager le travail et s’entraider. Ces groupes étaient informels mais des dizaines de familles se rassemblaient souvent pour travailler sur leurs maisons en équipe.

En vue de guider les travaux de construction, des directives en matière de construction sûre ont été élaborées par CARE Philippines et partagées avec les familles. Ces directives se concentraient sur trois techniques qui améliorent sensiblement la sécurité et qui sont abordables :

  • Les techniques de construction qui renforcent les habitations, comme les entretoises.
  • La construction de fondations solides comme point de départ pour les constructions.
  • La garantie que les toits sont bien fixés à la structure.

Les subventions supplémentaires accordées par CARE Philippines ont permis à certaines familles de développer leurs petites entreprises afin de générer des revenus et soutenir le rétablissement de la communauté.

CARE Philippines était la principale organisation responsable du projet. CARE a également collaboré avec ACCORD, une organisation philippine qui renforce les capacités des communautés et promeut des constructions résistantes. ACCORD a fourni des formations pour enseigner les résidents à construire des habitations plus solides en utilisant les directives en matière de construction plus sûre. En plus d’ACCORD, d’autres organisations plus petites ont également agi en tant qu’intermédiaires locaux entre CARE Philippines et les communautés. Elles étaient chargées de la mise en œuvre du programme au quotidien. Ces organisations incluent des coopératives et des ONG comme le Leyte Center for Development, le Metro Ormoc Community Multi-Purpose Cooperative, and the l’USWAG Development Foundation.

Quel est son impact ?

Le programme a eu impact positif à plusieurs égards :

  • Plus de 15.000 personnes affectées par le typhon jouissent à présent d’une habitation sûre qui est plus résistante que leur ancien logement.
  • Le développement d’un sentiment d’implication et de propriété grâce à l’implication des résidents dans la construction de leurs logements.
  • De nombreuses familles ont été aidées car les ressources ont été allouées pour permettre aux résidents de participer dans la construction de leurs logements plutôt que pour payer des entrepreneurs externes plus coûteux, ce qui aurait permis de construire moins de logements avec le même budget.
  • Les matériaux utilisés et l’accent sur les directives en matière de construction plus sûre implique que les maisons construites sont plus résistantes que les habitations dans lesquelles vivaient les familles avant le passage du typhon.
  • L’accent sur le logement et sur la génération de revenus a permis aux familles de disposer d’un logement sûr et de nouvelles opportunités de travail.

L’élaboration des directives en matière de logement plus sûr a été appréciée par le ministère de l’Aide sociale et du Développement du gouvernement des Philippines. Ils souhaitent maintenant intégrer ces directives dans les futures réponses aux catastrophes naturelles. Le programme a également inspiré un programme de recherche sur la promotion des constructions sûres pour soutenir les autoconstructions après les catastrophes naturelles qui soulignera le potentiel de l’implication des résidents dans les constructions lors des réponses aux catastrophes naturelles.

Comment est-il financé ?

La majorité des coûts ont été financés par les fonds de l’organisation CARE, pour un montant total de 145,6 millions de pesos philippins (3 millions de dollars). Les propriétaires ont bénéficié de subventions de 3.000 pesos philippins (environ 55 dollars) pour acheter des matériaux de construction.

Lorsque l’on combine cette subvention avec les matériaux fournis par CARE (toitures, courroies de protection, clous et outils), le coût total par maison était d’environ 190 dollars. Les résidents devaient fournir une petite contribution financière. Toutefois, les familles les plus vulnérables (environ 45 pour cent des bénéficiaires du programme) ont bénéficié de subventions supplémentaires de 5.000 pesos philippins (environ 90 dollars). Les familles ont également récupéré des matériaux des débris laissés par la tempête et ont fourni une main-d’œuvre gratuite pour réduire les coûts.

D’autres subventions ont été octroyées par CARE à de nombreuses familles pour acheter par exemple du bétail. Il y a même un exemple où 70 familles se sont réunies pour acheter une rizière.

L’aide financière accordée dans le cadre du programme a permis aux familles de ne pas s’endetter lors de la reconstruction de leurs habitations.

Aspects innovants

L’implication à grande échelle des résidents dans leurs solutions de logement est innovante lorsqu’il s’agit de reconstructions après des catastrophes naturelles, dans la mesure où ce travail se base plus souvent sur des experts que sur la communauté. Ce programme a atteint davantage de personnes grâce à l’accent placé sur les autoconstructions. Ce programme a permis de démontrer aux organisations humanitaires que cette approche peut être efficace, rapide et durable pour reconstruire des logements après des catastrophes naturelles.

C’est la communauté même qui débute le processus de rétablissement après une catastrophe naturelle. Le programme de reconstruction des habitations après le passage du Typhon Haiyan a permis de répondre rapidement à la catastrophe et de se baser sur le travail de rétablissement déjà amorcé par la communauté.

L’approche globale de CARE en matière de rétablissement est innovante. Juste après le passage du typhon, CARE et ses partenaires locaux ont donné de la nourriture, de l’eau et des kits d’abri aux bénéficiaires. Des orientations sur les directives en matière de construction sûre ont été données avant de donner les kits d’abri afin de s’assurer que les bénéficiaires les utilisent correctement. Des allocations de subsistance ont été accordées aux communautés et CARE et ses partenaires locaux continuent de mettre en œuvre des projets de rétablissement des moyens de subsistance dans les communautés affectées. Cette approche est assez différente des projets traditionnels de réponse aux catastrophes qui se concentrent principalement sur la fourniture d’un produit (comme un hébergement temporaire ou la relocation) pendant une période spécifique mais qui ne mettent par exemple pas œuvre des projets axés sur les moyens de subsistance que les bénéficiaires nécessitent pour gagner leur vie et rester dans la communauté.

Le projet a placé le contrôle et les décisions dans les mains des familles plutôt que de l’organisation mettant en œuvre le projet, permettant aux familles de pouvoir prendre les décisions qui les concernent. Les familles peuvent également utiliser plus tard les techniques qu’elles ont apprises. L’octroi de subventions a également permis aux familles de pouvoir acheter leurs propres matériaux de construction et/ou de payer d’autres personnes pour effectuer les travaux plus rapidement que si elles avaient dû attendre pour obtenir de l’aide. Cette approche permet une réponse rapide.

L’accent sur le logement et sur la génération de revenus est une approche plus holistique en matière de rétablissement, reconnaissant que les logements et les moyens de subsistance sont souvent lies.

Quel est son impact sur l’environnement ?

Le projet a utilisé des matériaux locaux de construction et a récupéré des débris après le passage du typhon pour réduire l’impact sur l’environnement. Des centaines de milliers de palmiers ont été détruits par le typhon et le bois de cocotier est devenu le principal matériau utilisé pour construire les maisons. Cela signifie également que les matériaux étaient recherchés le plus localement possible, souvent à proximité des nouvelles habitations.

Le programme a également permis aux entrepreneurs locaux de créer des petites entreprises visant à utiliser le bois endommagé, fournissant des nouvelles opportunités d’emploi. L’utilisation de bois dur, moins écologiquement durable, a été limitée aux fondations et ce bois a souvent été recyclé à partir des habitations détruites. Le bambou a également été utilisé, car celui-ci pousse rapidement et est une culture écologiquement durable.

Cette approche encourage l’utilisation des matériaux locaux, et les produits importés et à énergie grise élevée[1] sont limités à quelques matériaux. Les habitations sont construites dans les mêmes régions où elles avaient été détruites, ce qui implique qu’il n’était pas nécessaire de trouver de nouveaux terrains.

Les directives en matière de construction sûre élaborées par le programme ont permis de sensibiliser les communautés sur les pratiques relatives aux construction durables.

[1] L’énergie grise est l’énergie consommée par tous les processus liés à la construction d’un bâtiment, du minage à la fabrication en passant par le traitement des ressources naturelles et la livraison des produits.

Viabilité financière

Le programme de reconstruction des habitations après le passage du Typhon Haiyan s’est terminé en 2016 et l’objectif n’était pas d’être viable financièrement après cette date. Toutefois, ce programme a respecté les moyens de chaque famille, rendant les logements abordables pour tous les bénéficiaires. Lorsque les travaux de construction étaient terminés, les familles étaient propriétaires de leurs maisons et ne devaient dès lors pas payer de loyer.

Les subventions accordées par CARE étaient inférieures à la valeur totale des reconstructions. Cela implique que certaines familles ont été obligées d’utiliser leur propre argent pour financer les reconstructions en fonction de leurs ressources disponibles.

Les prêts ont aidé les familles à commencer le processus de construction. Étant donné qu’une main-d’œuvre locale a été utilisée pour la reconstruction des habitations, les familles peuvent faire de nouveaux travaux dans leurs logements par la suite si leurs finances le permettent.

Même si l’impact à long terme du programme est l’amélioration de la résilience financière dans les communautés, le rétablissement qui suit les grandes catastrophes naturelles nécessitera toujours des fonds externes importants pour répondre aux dégâts causés le plus rapidement possible.

Quel est son impact social ?

Les communautés ont pu rester dans leurs villages après le passage du typhon car le projet leur a permis de reconstruire leurs logements au même endroit. Étant donné que les logements sont plus résistants, les familles devraient pouvoir y habiter pendant de nombreuses années, même si de nouvelles catastrophes naturelles venaient à toucher ces régions.

La cohésion communautaire et la coopération ont été développées dans le cadre du projet qui se concentre sur la collaboration pour la reconstruction des habitations. Aux Philippines, cet esprit communautaire est appelé bayanihan. Nombre des personnes impliquées dans le projet ont estimé que celui-ci favorisait cet état d’esprit en permettant aux résidents de prendre les décisions relatives à leurs propres logements. Les voisins se rassemblent pour s’entraider, ce qui fait passer le message que tout le monde travaille vers un objectif commun. Le fait d’être encouragé à prendre en main son propre rétablissement après le passage du typhon a permis à certaines familles de mieux gérer le traumatisme psychologique de l’événement.

La magnitude du Typhon Haiyan a engendré la perte des moyens de subsistance en plus de la destruction des habitations. Le projet a aidé de nombreuses familles à développer de nouvelles compétences et à accéder à de nouveaux emplois. Les opportunités génératrices de revenus comme la création de petites entreprises ont été encouragées par l’octroi de subventions. Les compétences en matière de construction développées dans le cadre du projet étaient importantes et les techniques apprises permettent maintenant de sensibiliser les générations futures sur les pratiques durables en matière de construction.

CARE s’est engagé au niveau mondial à renforcer les capacités des femmes, et une approche axée sur l’égalité entre les sexes a été adoptée pour garantir une inclusion équitable des femmes dans le projet. CARE Philippines a notamment encouragé les femmes à jouer un rôle actif dans les prises de décisions et dans les constructions. Les groupes de discussion au début du projet étaient principalement composés de femmes. Les femmes ont également aidé les menuisiers à fournir une aide technique en ayant des discussions avec leurs voisins pour connaître leurs besoins avant de prodiguer des conseils. La participation des femmes dans la gestion du projet a été facilitée, et leur participation dans la construction a dès lors augmenté également.

Obstacles

Le projet a dû faire face à deux grands obstacles. Premièrement, certaines familles ont rencontré d’importantes difficultés pour trouver de l’argent afin de compléter la subvention accordée par CARE Philippines en vue de construire leurs logements. CARE a répondu à ce problème en accordant une subvention complémentaire aux familles qui étaient le plus dans le besoin. La combinaison de ces deux aides a permis d’obtenir un taux de reconstruction de 92% grâce à ce programme. La fourniture de matériaux essentiels au début du projet a également permis aux familles de reconstruire leurs logements sur de bonnes bases sans devoir emprunter ou dépenser des sommes importantes.

Un deuxième obstacle était de s’assurer que les familles suivent les directives en matière de construction sûre lors de la construction des nouvelles habitations. Ce problème a été réglé par l’introduction d’une équipe de menuisiers qui ont fourni une aide technique aux familles. En outre, les matériaux fournis au début du projet ont été sélectionnés pour aider les familles à suivre ces directives.

Leçons retenues

Le projet a permis à CARE Philippines d’évaluer son travail et de tirer plusieurs leçons, comme :

  • Les programmes futurs devraient déterminer s’il faut cibler les personnes les plus vulnérables ou si d’autres programmes similaires devraient être développés pour bénéficier aux communautés entières.
  • Les ménages qui avaient déjà reconstruit leurs logements avant le programme n’en ont pas bénéficié mais l’approche pourrait être reconduite pour permettre à ces ménages d’accéder également à des subventions.
  • Si le programme est transféré, il serait utile de combiner le projet de logement avec d’autres domaines comme l’accès à l’eau et aux installations sanitaires.
  • Dans certains cas, les directives en matière de construction sûre n’ont pas été respectées, ce qui pourrait avoir été évité si les familles avaient bénéficié de davantage de formations et d’accompagnement.
  • Il est plus intéressant que les familles achètent les matériaux et les outils collectivement plutôt qu’individuellement. Cette stratégie a été mise en œuvre dans d’autres programmes.
  • Davantage d’aide est nécessaire lorsque les familles ne peuvent effectuer elles-mêmes les travaux de construction.

Évaluation

Le programme de reconstruction des habitations après le passage du Typhon Haiyan a été évalué plusieurs fois et de différentes façons. Tout au long du programme, CARE Philippines a réalisé des rapports réguliers pour les bailleurs et une évaluation qui compare le programme à d’autres réponses au Typhon Haiyan. CARE Philippines réalise actuellement une présentation finale du programme pour les bailleurs incluant le Disaster Emergency Committee (DEC), Affaires mondiales Canada et Diagio.

L’équipe britannique d’hébergement de CARE International a réalisé deux projets d’évaluation. La première évaluation a été réalisé après la première année du programme, analysant en détail les niveaux de construction des habitations. Cette évaluation a révélé que la majorité des habitations avaient été terminées selon des normes adéquates, disposant d’un toit et de murs sûrs, en ayant mis en œuvre les directives en matière de construction sûre. Certains résidents estimaient toutefois que leurs logements n’étaient pas terminés et souhaitaient dès lors les améliorer en construisant par exemple des murs de contreplaqué plutôt que de bambou. Ils ne pouvaient toutefois pas réaliser ces travaux à cause d’un manque d’argent. Certains résidents ont également émis quelques réserves par rapport aux critères de vulnérabilité et au processus de sélection utilisés.

La deuxième évaluation a analysé de façon plus générale le niveau de rétablissement ainsi que les leçons qui pouvaient être tirées de ce programme. Malgré les réserves des résidents mentionnées un peu plus haut, ces deux évaluations étaient très positives et ont démontré que le projet avait permis de construire des logements de meilleure qualité, plus sûrs, plus solides et parfois plus grands. Les familles exprimaient également un sentiment de fierté par rapport à ces constructions. Les évaluations ont été utilisées dans le cadre d’autres réponses à des catastrophes naturelles au Vanuatu, au Fiji et au Népal.

Une évaluation séparée réalisée par Habitat for Humanity GB et CARE International et intitulée ‘Leçons d’Haiyan’ propose une analyse comparative des évaluations.

L’équipe de recherche britannique de CARE International évalue actuellement la perception de « rétablissement » selon la perspective des familles affectées. Ce travail s’inscrit dans le cadre d’un projet de recherche interdisciplinaire qui analyse les parcours des ménages en matière de rétablissement ainsi que la façon dont les pratiques en matière de construction sûre peuvent être intégrées plus efficacement dans les réponses humanitaires d’hébergement.

Reconnaissance

Le projet n’a pas encore obtenu de reconnaissance à ce jour. Toutefois, son travail a été cité dans différents rapports et articles comme un exemple de bonne pratique au niveau du rétablissement après une catastrophe naturelle.

Un récent article d’Euronews parle du programme et de la collaboration entre CARE Philippines et ACCORD. Ce travail a été également mentionné dans le Forced Migration Review Journal et sur le site de l’Humanitarian Practice Network.

CARE International a récemment lancé un partenariat de recherche entre l’Overseas Development Institute, le British Geological Survey et l’Engineering Department of University College London. L’objectif est d’étudier les techniques de construction et les processus de rétablissement selon la perspective des personnes affectées, en utilisant le programme comme une étude de cas.

Transfert

Le programme a initialement été mis en œuvre sur trois îles (Leyte, Samar et Panay). Depuis lors, CARE Philippines a développé des projets similaires en réponse aux Typhons Hagupit/Ruby (2014) et au Typhon Haima (2016). Ces transferts ont été adaptés sur base des leçons retenues. Par exemple, les matériaux de construction ont été achetés collectivement pour réaliser des économies. Les résidents se sont réunis pour rédiger une liste des outils nécessaires. Le projet a placé l’accent sur la formation dans la mesure où les connaissances des menuisiers locaux ont été utilisées pour profiter à l’ensemble de la communauté.

Le programme est utilisé comme étude de cas pour étudier l’efficacité des autoconstructions dans les réponses aux catastrophes naturelles. On espère qu’il servira de modèle pour des projets futurs. Les leçons tirées ont influencé des projets similaires au Fiji, au Népal et au Vanuatu mis en œuvre par CARE.